Discussion:
Sacrifices humains et mises à mort rituelles à Rome
(trop ancien pour répondre)
abourick
2009-03-08 09:40:00 UTC
Permalink
Un texte très intéressant sur le sacrifice humain chez les Romains.
J'attire l'attention de ceux qui connaissent les travaux de René Girard
sur les circonstances qui ont rendu nécessaire le recours au sacrifice
humain.


http://bcs.fltr.ucl.ac.be/FE/08/sacrifices.htm


Sacrifices humains et mises à mort rituelles à Rome : quelques observations

par Françoise Van Haeperen
Professeure à l'Université de Louvain


<***@anti.ucl.ac.be>



Cet article est issu d'une communication présentée en
février 2004 à l'Université catholique de Louvain (Louvain-la-Neuve) à
des étudiants de 3e cycle en histoire moderne et contemporaine dans le
cadre d'un séminaire de DEA consacré à la violence interpersonnelle en
Occident.

On trouvera dans Res Antiquae, t. 2, 2005, p. 327-346, sous
le titre Mises à mort rituelles et violences politiques à Rome sous la
République et sous l'Empire, le développement de certains des thèmes ici
traités.





Plan

* Introduction
* Problèmes de définition
* Perceptions romaines du sacrifice humain
o Le sacrifice humain aux origines et sa
substitution par d'autres types d'offrandes
o Le sacrifice humain, un élément indiquant la
contingence de la norme
o Le sacrifice humain, une caractéristique du «
barbare »
o Le sacrifice humain, une caractéristique du
dévoyé, de l'ennemi public au sein de l'État
* Pratiques romaines du sacrifice humain dans le cadre
de la religion publique
o Ensevelissement de couples vivants au Forum Boarium
o Ensevelissement de vestales fautives
o Mise à mort rituelle des androgynes
o Sacrifice humain à Jupiter Latiaris
* Quelques remarques conclusives
* Bibliographie



Introduction

Les sacrifices humains représentent pour nos esprits
modernes une forme de violence ultime, excessive, extrême. De manière
générale, les Romains condamnaient déjà cette pratique, considérée comme
barbare. Pourtant, dans certains cas, rares, ils ont effectivement
accompli des rites que nous qualifierions volontiers de sacrifices
humains et qu'ils présentaient, parfois, comme tels.

Si les sacrifices humains dans le monde grec ont fait
l'objet de synthèses récentes (D.D Hugues, 1991 ; P. Bonnechère, 1994),
il n'en va pas de même pour Rome [1]. Sans entrer dans le détail des
discussions historiographiques, signalons cependant deux grandes
tendances qui ont vu les savants s'opposer, à propos des sacrifices
humains que les Romains auraient accomplis aux origines : les uns
adoptaient une attitude négationniste, refusant l'idée que les Romains
aient pu se livrer à de telles pratiques (pour G. Wissowa, 1912, p. 35,
420, par ex., les sacrifices humains attestés par la suite seraient la
conséquence d'emprunts à des peuples étrangers), tandis que d'autres
(par ex. G. Capdeville, Substitution, 1971, p. 283-323) acceptaient,
sans beaucoup d'esprit critique, les récits relatifs à ces sacrifices
humains primordiaux. On s'est également longtemps interrogé sur les
origines des rares mises à mort rituelles attestées durant les derniers
siècles de la République et sous l'Empire, en particulier
l'ensevelissement de Vestales vivantes ou de couples de Grecs et de
Gaulois, vivants, au Forum Boarium. Plus récemment, quelques savants ont
attiré l'attention sur le déroulement de ces rites, leur contexte
politico-militaire et leur signification (A.M. Eckstein, 1982 ; A.
Fraschetti, 1981, 1984). D'autres se sont penchés sur la fonction
qu'occupe le thème du sacrifice humain dans les discours, dans les
représentations romaines ainsi que sur la manière dont les Romains
percevaient cette réalité (J. Rives, 1995 ; Cr. Grottanelli, 1999).

C'est sur la base de ces études plus récentes que
seront ici développées quelques réflexions de synthèse, partielles, sur
les sacrifices humains ou mises à mort rituelles à Rome. J'ai, jusqu'à
présent, utilisé indistinctement ou presque les deux expressions. Une
première question à poser sera celle de la définition d'un sacrifice
humain. On envisagera ensuite, à travers une sélection de textes,
quelles étaient les représentations romaines liées à cette pratique.
Enfin seront examinés quelques cas attestés de mises à mort rituelles
dans la Rome républicaine et impériale.

Seules les sources littéraires seront ici prises en
considération. Il serait intéressant dans l'avenir d'envisager aussi les
témoignages archéologiques, qui ne sont pas sans soulever parfois de
sérieux problèmes d'interprétation. Pensons par exemple aux squelettes
retrouvés aux Doliola sur le Forum romain.

[Retour]





Problèmes de définition

La question de la définition des sacrifices humains
mérite d'être posée avant de poursuivre cette étude. Celle-ci ne va pas
de soi, comme on le verra à partir de quelques exemples. Elle a souvent
été éludée ou rapidement évoquée par les savants qui ont traité cette
question pour le monde romain. Ainsi, V. Groh (Sacrifizi umani, 1933, p.
240) définissait brièvement les sacrifices humains comme des cas de
mises à mort de citoyens pour des raisons sociales.

A. Brelich (Symbol, 1969, p. 195-207) proposait pour sa
part une définition un peu plus développée, en distinguant sacrifices
humains et mises à mort rituelles : les sacrifices humains sont offerts
à des êtres supra-humains (superhuman recipient), tandis que les autres
sont des rites exigeant la mise à mort d'humains sans toutefois
appartenir au culte d'êtres supra-humains.

Dans son ouvrage sur les sacrifices humains en Grèce,
P. Bonnechère (1994, p. 13) a attiré l'attention sur les problèmes que
pose cette définition : « comment s'assurer que, lors des meurtres
rituels, les participants n'aient pas été amenés à ressentir une
présence divine ou démoniaque, diffuse mais en tout cas supra-humaine,
qui aurait transformé, imperceptiblement pour nous, ces meurtres rituels
en sacrifices humains ? Comment s'assurer que, dans certains
témoignages, la présence d'une divinité ne se soit pas imposée dans le
rituel primitif ou n'en ait pas disparu avec le temps ? Rien n'exclut,
en principe, qu'un sacrifice humain ne sombre dans la sphère des
meurtres rituels, et vice versa. Cette mobilité potentielle des termes
et des réalités s'aggrave encore lorsqu'il s'agit de déterminer si la
distinction proposée doit s'effectuer sur le plan des conceptions
actuelles ou sur le plan de la mentalité des peuples étudiés [...]. »
Dès lors, le savant choisit « d'appeler sacrifice humain toute mise à
mort rituelle d'êtres humains ».

Voyons enfin la définition proposée récemment par H.
Cancik dans l'article Menschenopfer du DNP (1999, col. 1253) : « Le
sacrifice humain n'est pas une mise à mort considérée comme illégale […]
; il se situe dans le cadre des rituels d'offrande qui sont généralement
acceptés dans une religion et une culture donnée et qui sont également
utilisés pour la mise à mort d'autres êtres vivants. Les mises à mort
d'hommes dans d'autres rituels qui ne sont pas considérés comme illégaux
(par exemple dans le cadre du culte des morts ou la deuotio dans la
bataille) ne sont pas des sacrifices humains. La mise à mort d'hommes
dans le contexte d'expiation purificatrice de présages constitue un cas
limite, controversé dans la recherche. Les mises à mort intentionnelles
et illégales dans des rituels illicites (magie, enchantement, prédiction
de l'avenir) sont des homicides ou des meurtres rituels ». Un point
important de la définition de la savante se situe dans l'aspect « non
illégal » du sacrifice humain. Il est par contre plus difficile de
comprendre les raisons de la distinction qu'elle opère entre les mises à
mort « non illégales » qui peuvent être définies comme des sacrifices
humains, parce qu'elles se situent dans le contexte de rituels
d'offrande, et les mises à mort « non illégales » effectuées dans le
cadre d'autres rituels. En quoi le type de rituel, rituel d'offrandes ou
autres, permet-il de parler de sacrifices humains ? En outre, cela
suppose aussi que l'on puisse toujours déterminer avec précision le type
d'un rituel (et on peut se demander aussi sur quelles bases l'on
dressera cette classification ; selon les critères des anciens ou en
fonction de théories modernes). Cette définition, reconnaît d'ailleurs
la savante, pose un problème aux chercheurs : comment considérer les
mises à mort destinées à expier des présages ?

Au-delà des définitions théoriques et des problèmes
qu'elles soulèvent, l'on peut, comme P. Bonnechère, considérer comme
sacrifice humain « toute mise à mort rituelle d'êtres humains ». Je le
suivrai ici en envisageant différentes formes de mise à mort rituelle,
qui pourront donc également être qualifiées de sacrifices humains dans
ces pages. Il serait également intéressant d'envisager systématiquement
la terminologie antique, de confronter les unes aux autres les visions
antiques relatives à des mises à mort rituelles : le vocabulaire utilisé
relève-t-il du champ sémantique du sacrifice humain et dans le cas
contraire à quoi fait-il référence ? Seule une sélection de textes sera
présentée mais sur cette base déjà, quelques observations pourront in
fine être formulées.

[Retour]




Perceptions romaines du sacrifice humain

Quelle place, quelles fonctions occupait la thématique
du sacrifice humain à Rome dans les discours des Anciens, dans leurs
représentations mentales ? Ce thème fait l'objet de développements dans
des textes relatifs aux origines de la civilisation romaine. On le
retrouve également dans des réflexions sur ce que l'on pourrait appeler
la « contingence de la norme » mais aussi dans des passages où il est
question de l' « autre », du « barbare », ou de l'ennemi de l'État.


Le sacrifice humain aux origines et sa substitution par
d'autres types d'offrandes

La question des sacrifices humains aux origines de Rome
a obnubilé certains modernes, qui ont été tentés de croire les récits
des anciens : les sacrifices humains des origines ont ainsi, selon eux,
été remplacés par des rites de substitution toujours pratiqués durant
l'époque historique. Il est très vraisemblable que la réalité des
origines soit fort différente [2] ; ce n'est toutefois pas cet aspect
des choses qui nous occupera mais bien les perceptions des anciens,
relatives aux sacrifices humains des origines.

De manière un peu abrupte et schématique, l'analyse de
différents textes permet la constatation suivante. Pour les Romains, le
sacrifice humain est une pratique qui caractérisait leurs ancêtres
lointains, avant qu'ils n'aient atteint un certain degré de «
civilisation » (Cr. Grottanelli, 1999, p. 42-45). Précisons que l'époque
de ces ancêtres peut précéder ou suivre la fondation de la Ville. Un
personnage mythique ou considéré comme historique intervient alors pour
leur interdire l'accomplissement de tels actes ; ces sacrifices humains
sont alors remplacés par des rites de substitution.

Ainsi, selon Denys d'Halicarnasse (1, 38, 3), Hercule
mit fin aux sacrifices humains qu'offraient jusqu'alors les anciens sur
le site de la future Rome :

« afin que ces hommes n'aient aucune peur ou scrupule
d'avoir abandonné les sacrifices ancestraux, il apprit aux indigènes,
pour apaiser la colère du dieu, à fabriquer à la place des hommes qu'ils
jetaient pieds et poings liés dans le courant du Tibre des mannequins à
figure humaine, habillés de la même façon qu'eux, et à les précipiter
dans le fleuve, afin que la crainte superstitieuse qui habitait alors
toutes les âmes fut extirpée, les apparences de l'ancien supplice étant
sauvegardées. » (trad. V. Fromentin, CUF, 1998)

L'historien précise également que les Romains
accomplissaient encore ce rite à son époque, en mai ; il correspond à la
cérémonie des Argées, durant laquelle les vestales jetaient dans le
Tibre des mannequins représentant des hommes.

Macrobe (Sat. 1, 7, 31) attribue le même rôle «
civilisateur » à Hercule. Avant son arrivée en Italie, les Pélasges
offraient des têtes humaines à Dis Pater et des victimes humaines à
Saturne, à cause de l'oracle qui disait : « Offrez des têtes à Hadès et
des hommes à son père ».

« Mais plus tard, Hercule, selon la tradition, ramenant
à travers l'Italie le troupeau de Géryon, persuada leurs descendants de
remplacer par des offrandes de bon augure ces offrandes funestes, en
donnant à Dis Pater non des têtes d'hommes mais des figurines façonnées
à l'image de l'homme, et en honorant les autels de Saturne non par des
sacrifices humains, mais par des cierges allumés, puisque le terme phôta
signifie non seulement ‘homme' mais aussi ‘lumières' ». (trad. Ch.
Guittard, La Roue à Livres, 1997)

C'est de là, poursuit l'auteur, qu' « est né l'usage de
s'envoyer des chandelles de cire pendant les Saturnales ».

Denys et Macrobe interprètent donc des rites existant
encore à leur époque comme des rites de substitution : les victimes
humaines ont été remplacées par des objets.

Dans le célèbre dialogue entre Numa et Jupiter (cfr J.
Scheid, Numa, 1985, p. 41-53), on voit le deuxième roi de Rome jouer au
plus fin avec le dieu, afin d'obtenir que la victime à offrir pour
expier la foudre ne soit pas humaine. Là où Jupiter exige une tête, Numa
propose une tête d'oignon. Le dieu précise alors sa demande : « "la tête
d'un homme" ; le roi répond : "tu prendras ses cheveux" ; mais le dieu
exige une vie ; Numa réplique : "la vie d'un poisson". Le dieu se mit à
rire et dit : "Par ces offrandes, tâche de conjurer les traits de ma
foudre, ô mortel qui n'es pas indigne de converser avec les dieux" »
(Ovid. Fast. 3, 339-342 ; voir aussi Plut. Numa 15, 5).

Numa, le roi fondateur des institutions religieuses,
obtient donc de Jupiter que les sacrifices humains ne fassent pas partie
des rites expiatoires romains en matière de foudre. Le pieux Numa pose
les bases d'une religion qui ne fait pas couler le sang humain.
L'absence de sacrifice humain semble aussi constituer ici un trait de la
relation entre hommes et dieux, basée sur un dialogue où le représentant
humain conçoit le dieu comme un partenaire.

À la suite du passage cité ci-dessus, Macrobe envisage
un autre rite de substitution : lors des jeux des Compitalia, la fête
des carrefours, on célébrait, depuis le roi tyrannique Tarquin le
Superbe, des sacrifices d'enfants à la déesse Mania, mère des Lares, à
la suite d'un oracle d'Apollon « prescrivant de demander la faveur des
dieux pour des têtes en offrant des têtes » (Macr. Sat. 1, 7, 34-35).

Après l'expulsion des Tarquins, Junius Brutus, l'un des
premiers consuls de la jeune République, modifia les modalités de ce
sacrifice : « Il ordonna en effet de demander la faveur des dieux à
l'aide de têtes d'ail et de pavot pour satisfaire l'oracle d'Apollon au
sujet du mot "tête", en supprimant évidemment le crime d'un sacrifice
funeste ; l'usage s'établit aussi de conjurer un éventuel danger
menaçant la maisonnée en suspendant des figurines à Mania devant la
porte de chaque maison » (trad. Ch. Guittard, La Roue à Livres, 1997).

Le rite sanglant du sacrifice humain remonte ici à
l'époque d'un roi haï, tyrannique, qui, à la différence de son
prédécesseur Numa, n'a pas pu interpréter les paroles du dieu dans un
sens favorable aux hommes. Une fois le Superbe chassé, le consul Brutus,
initiateur d'une nouvelle ère, sera, lui, capable de transformer la
forme du sacrifice en rite non sanglant, tout en ménageant la
susceptibilité d'Apollon.

Avec Cr. Grottanelli (1999, p. 44), on peut donc
arriver à cette conclusion : qu'elle soit attribuée à Hercule, au roi
fondateur des institutions religieuses ou au premier consul, Brutus, la
substitution des sacrifices humains par d'autres rites est considérée
par nos sources comme une partie intégrante, constitutive du système romain.

[Retour]


Le sacrifice humain, un élément indiquant la contingence de
la norme (Voir J. Rives, 1995, p. 69-70)

Dans un passage de son De republica (3, 14-15), Cicéron
se penche sur la diversité des coutumes des différents peuples. Il y
envisage notamment les coutumes religieuses : les formes revêtues par
les divinités sont fort différentes en Égypte, en Grèce ou en Perse. Il
constate également que pour un certain nombre de peuples, tels les
Taures, sur l'Euxin, les Gaulois ou les Carthaginois, les sacrifices
humains constituaient « un rite pieux et extrêmement agréable aux dieux
immortels ».

Le sacrifice humain représente dans ce passage un des
exemples qui permettent à Cicéron de montrer que les usages, la norme,
les habitudes différent d'un endroit à l'autre. Si l'auteur n'exprime
pas ici de jugement de valeur sur cette pratique, une telle attitude est
cependant rare.

[Retour]


Le sacrifice humain, une caractéristique du « barbare »

Bien plus souvent, le sacrifice humain est considéré
négativement par les auteurs comme un rite caractérisant les « barbares
». Ainsi, à la fin des années 70 av. n.è., Cicéron, dans sa défense de
Fonteius, gouverneur de la Gaule Transalpine incriminé de concussion par
les provinciaux, utilise le thème du sacrifice humain pratiqué par les
Gaulois pour prouver qu'on ne peut faire confiance à leur accusation.

« Enfin que peut-il y avoir de saint et de sacré pour
ces hommes qui, même quand la terreur leur fait concevoir qu'il faut
apaiser les dieux, souillent leurs autels et leurs sanctuaires de
victimes humaines (humanis hostiis), et ainsi ne peuvent célébrer un
culte sans l'avoir d'abord profané par des pratiques criminelles ? Qui
ne sait en effet qu'ils ont conservé jusqu'à ce jour la coutume
monstrueuse et barbare des sacrifices humains (illam immanem ac barbaram
consuetudinem hominum immolandorum) ? Ainsi, quelle peut être,
croyez-vous, la bonne foi, la piété de ces hommes, capables de
s'imaginer que les dieux immortels se laissent le plus aisément fléchir
par les crimes et par le sang des hommes ? Et ce sont de tels témoins
que vous associerez à votre religieuse loyauté ? et vous croirez que
dans leurs paroles ils aient fait preuve de scrupule ou de modération ?
». (Cic. Font. 31 ; trad. A. Boulanger, CUF, 1919)

L'orateur juge ici durement cette pratique, qualifiée
de termes très négatifs. Des hommes ayant une conception de leurs dieux
telle qu'ils accomplissent des sacrifices humains ne sont pas dignes de
foi, argumente-t-il. Cicéron n'attaque donc pas seulement ce rite
sanglant mais également ce qu'il considère comme son fondement,
c'est-à-dire une conception erronée des dieux, basée sur la terreur.
Conception, notons-le, qui s'oppose à la vision que les Romains avaient
de leurs dieux, considérés comme les partenaires pacifiques de la cité,
soucieux du bien-être terrestre des hommes, à condition que ceux-ci leur
rendent les hommages qui leur sont dus (voir J. Scheid, 1998, p. 22, 27).

Les Romains peuvent s'enorgueillir, comme Pline
l'Ancien (nat. 30, 13), d'avoir aboli en maints endroits cette pratique
« barbare », au fur et à mesure que ces régions en marge du monde
classique furent absorbées par l'Empire romain.

[Retour]


Le sacrifice humain, une caractéristique du dévoyé, de
l'ennemi public à l'intérieur de l'État

Le motif du sacrifice humain ne sert pas uniquement à
caractériser le « barbare », il est également utilisé pour dépeindre, à
l'intérieur du monde romain, le dévoyé ou l'ennemi de l'État (J. Rives,
1995, p. 71-75 ; Cr. Grottanelli, 1999, p. 47-52). Deux exemples
l'illustreront.

Selon différents auteurs, Catilina et sa bande
n'auraient ainsi pas hésité à immoler un homme et à se repaître de ses
chairs (Plut. Cic. 10, 4 ; Dio Cass. 37, 30, 3). Réalité affreuse ou
propagande diffamatoire ? Salluste (Cat. 22, 1-2) déjà se posait la
question et semblait pencher pour la seconde solution :

« certains ont prétendu qu'après son discours Catilina,
au moment où il faisait prêter le serment à ses complices, aurait fait
circuler des coupes pleines de sang humain mélangé à du vin ; tous y
ayant goûté, après avoir prononcé la formule d'exécration, comme il est
d'usage dans les sacrifices solennels, il leur aurait découvert son
dessein. Il aurait voulu ainsi rendre plus étroite leur fidélité
mutuelle, par la complicité d'un tel forfait. Quelques personnes
voyaient là et ailleurs encore une invention de ceux qui croyaient
diminuer la haine dont Cicéron fut plus tard l'objet par l'atrocité même
du crime de ceux qu'il avait fait punir. Il ne nous semble pas que la
chose, étant donné sa gravité, ait été suffisamment démontrée. » (trad.
A. Ernout, rev. et corr. J. Hellegouarc'h, 15e tirage, CUF, 1995)

Quoi qu'il en soit de la véracité de cette rumeur, les
adversaires de Catilina n'ont pas hésité à l'accuser d'avoir sacrifié
des victimes humaines - le sang humain bu par les conjurés que mentionne
Salluste provient très vraisemblablement de sacrifices humains, comme
permet de le supposer le parallèle avec les autres textes relatifs à cet
épisode. Cette pratique dont on crédite les conjurés contribue à en
faire des hors-la-loi.

Certains empereurs, considérés comme mauvais, ont été
accusés par les anciens d'avoir sacrifié des victimes humaines - ce
crime s'aggravant encore du fait qu'il s'agissait d'enfants (Cr.
Grottanelli, 1999, p. 50). Ainsi, l'empereur Héliogabale, contre-modèle
par excellence, aurait, parmi ses nombreux délits d'impiété, sacrifié
des enfants et examiné leurs entrailles, en vue de connaître les
dispositions divines (Dio Cass. 80, 11 ; Hist. Aug. Heliog. 8, 1-2 :
humanas hostias).

Le sacrifice humain apparaît, à travers ces textes et
d'autres encore, comme un attribut de l' « autre », qu'il s'agisse de
l'étranger ou de l'ennemi de l'État. Comme l'écrit J. Rives (1995, p.
83), le sacrifice humain fonctionne dans ces passages comme un
indicateur de différenciation culturelle : il a presque toujours dans
ces récits « de fortes connotations négatives et se réfère à des normes
culturelles considérées non seulement comme différentes mais comme
barbares ou mauvaises ».

[Retour]





Pratiques romaines du sacrifice humain dans le cadre de la
religion publique

Si les Romains ont interdit aux peuples qu'ils ont
soumis de sacrifier des victimes humaines, ils se sont cependant eux
aussi livrés à de telles pratiques, au moins dans certains cas. C'est la
constatation d'un tel paradoxe qui est à la base d'une des Questions
romaines de Plutarque (quaest. rom. 83) :

« Par quelle raison expliquer les faits suivants : en
apprenant que les barbares nommés Bletonesioi avaient offert aux dieux
un sacrifice humain, ils envoyèrent une mission chargée de punir leurs
chefs - ; et néanmoins, comme il apparaissait qu'ils n'avaient fait là
qu'appliquer leurs lois, on les laissa en liberté, non sans leur
interdire cette pratique à l'avenir. Mais alors comment se fait-il que
les mêmes Romains, peu d'années auparavant, aient enterré vifs, sur la
place appelée Marché aux Bœufs, deux hommes et deux femmes, les uns
grecs, les autres gaulois ? Il semble absurde de leur part de s'être
livrés eux-mêmes à de telles pratiques, tout en blâmant les barbares
pour leur comportement impie. » (trad. M. Nouilhan, J.-M. Pailler, P.
Payen, Le Livre de Poche, 1999)

Dans sa réponse, Plutarque précise notamment que les
Romains accomplirent ces sacrifices après avoir consulté les Livres
Sibyllins, et donc, peut-on conclure, dans le cadre de la religion
publique de Rome. Ces livres étaient en effet consultés par les
décemvirs (puis par les quindécemvirs), à la demande du Sénat, quand
survenaient des prodiges extraordinaires, qu'on ne pouvait expier par
les moyens habituels (voir J. Scheid, 1998, p. 101-103).

Dans un passage souvent cité, Pline (nat. 30, 12) nous
apprend pour sa part que dans les années 90 av. n.è. « un
sénatus-consulte interdit d'immoler un homme, ce qui démontre que
jusqu'à cette époque on accomplissait ces monstrueux sacrifices ». Il
importe de bien situer cette assertion dans son contexte : Pline traite
dans ce chapitre de la magie chez les différents peuples et notamment en
Italie. Les sacrifices humains dont il est question ici sont donc
accomplis dans le cadre de pratiques magiques, qui, à Rome, relevaient
de la sphère privée et correspondaient à une attitude jugée mauvaise par
rapport aux dieux.

Une différence importante sépare donc les sacrifices
humains mentionnés par ces deux auteurs : les premiers, dont parle
Plutarque, ont eu lieu dans le cadre de la religion publique ; les
seconds, dans le contexte de pratiques magiques, relevant de la pratique
privée.

Ce sont les mises à mort rituelles accomplies dans le
contexte de la religion publique qui vont nous retenir ici.

[Retour]


Ensevelissements de couples vivants au Forum Boarium

Trois fois durant la République, en 228, en 216 et en
114/113, les Romains ensevelirent vivants, au Forum Boarium, deux
couples d'étrangers, des Grecs et des Gaulois [3].

Voici le récit qu'en fait Plutarque (Marcell. 3, 3, 7),
pour le premier de ces cas :

« Cependant la proximité du lieu où la guerre allait
s'engager [= Nord de l'Italie], qui touchait immédiatement leur
territoire, inspirait une grande terreur aux Romains ; à cela s'ajoutait
l'antique prestige des Gaulois, celui des peuples qu'ils semblent avoir
le plus redouté, parce qu'il avait pris leur ville […]. Ce qui prouve
aussi leur effroi, ce sont les préparatifs qu'ils firent (car jamais,
dit-on, ni avant, ni après, les Romains ne mirent sur pied tant de
dizaines de milliers d'hommes) et le caractère inouï du sacrifice qu'ils
accomplirent. Eux qui d'habitude ne pratiquaient aucun rite barbare ni
étranger, et qui, partageant autant que possible les opinions des Grecs,
se montraient doux dans le culte rendu aux dieux, furent contraints,
quand la guerre eut éclaté, d'obéir à des oracles tirés des livres
Sibyllins et enterrèrent vivants deux Grecs, un homme et une femme, et
pareillement deux Gaulois sur la place appelée le Marché aux bœufs ; et,
de nos jours encore, au mois de novembre, on célèbre en leur honneur des
cérémonies secrètes, auxquelles personne ne peut assister. » (trad. R.
Flacelière, É. Chambry, CUF, 1966)

Citons également le passage de Tite-Live (22, 57, 2-6)
relatif aux sacrifices de 216 :

« Venant après de si graves défaites [= défaite de
Cannes lors de la 2e guerre punique], des prodiges troublèrent les
consciences : en particulier deux Vestales, cette année-là, furent
convaincues d'inconduite : l'une fut enterrée vivante à la porte
Colline, selon la règle ; l'autre s'était donné la mort. [...] Cette
faute, au milieu de tant de malheurs, passa pour un prodige, comme il
arrive souvent. On invita les décemvirs à consulter les Livres ; [...]
on fit quelques sacrifices exceptionnels (sacrificia aliquot
extraordinaria) après consultation des Livres sibyllins : au marché aux
bestiaux, un Gaulois et une Gauloise, un Grec et une Grecque furent
enterrés vivants (sub terram uiui demissi sunt), murés dans une enceinte
de pierre qui avait déjà servi auparavant à des sacrifices humains, si
contraires à la religion romaine (iam ante hostiis humanis, minime
Romano sacro, inbutum). » (trad. A. Flobert, Garnier Flammarion, 1993)

Signalons encore que, selon Pline l'Ancien (nat. 28,
12), de telles cérémonies eurent encore lieu à son époque, au 1er s. de
n.è. donc.

Quel est le vocabulaire utilisé par les auteurs qui
évoquent ces sacrifices ? Tite-Live parle de sacrifices extraordinaires
(sacrificia extraordinaria) et de victimes humaines (hostiis humanis) ;
Plutarque de sacrifices (thusia ; thuein anthrôpous). Pline évoque non
des sacrificia mais des sacra, des cérémonies.

Tite-Live et Plutarque insistent sur le caractère
inouï, exceptionnel de ces rites et semblent choqués devant cette
pratique considérée comme si contraire à la religion romaine par l'un,
comme barbare par l'autre.

Les origines de ces sacrifices humains ont fait couler
beaucoup d'encre chez les modernes. Pour certains, il s'agit d'un rite
d'origine étrangère : en effet, argumentent-ils notamment, les Grecs et
les Gaulois n'ont jamais été en même temps en conflit contre Rome [4].
Pour d'autres, au contraire, ce rite est romain (A. Fraschetti, 1981).
Mais ce n'est pas ce problème qui nous occupera. Voyons plutôt, sur la
base des études de A. Fraschetti (1981) et de A.M. Eckstein (1982), dans
quels contextes ces rites furent pratiqués - et selon quelle procédure,
et interrogeons-nous sur les significations qu'on peut leur attribuer.

Dans les trois cas, le contexte est similaire - A.
Fraschetti parle de costanti di emergenza, de constantes d'urgence :
d'une part, les Romains sont confrontés à des menaces extérieures,
mettant en danger la République ; d'autre part surviennent des prodiges.
Devant ces signes inquiétants, qui attestent la rupture de la pax
deorum, les Romains consultent les Livres sibyllins, par l'intermédiaire
de leurs prêtres, les décemvirs. Ceux-ci prescrivent l'ensevelissement
d'un couple de Gaulois et d'un couple de Grecs. Pline ajoute que le chef
du collège des (quin)décemvirs prononce une prière.

Le sacrifice s'avère efficace dans les différents cas :
le danger est écarté, les prodiges cessent. Et Pline d'affirmer : «
Quiconque lira la prière de ce sacrifice (sacri precationem) […] devra
reconnaître le pouvoir de ces incantations, pouvoir d'ailleurs
entièrement confirmé par huit cent trente ans de succès ». On n'est par
contre pas étonné qu'un auteur chrétien, Orose (4, 13, 1-4), évoque non
pas l'efficacité de ces sacrifices mais bien le malheur plus grand que
ceux-ci attirent sur les Romains.

Enfin, signale Plutarque, ont lieu des cérémonies
annuelles en l'honneur de ces victimes.

Quelle signification donner à ces rites ? Pendant
longtemps, on a interprété ces sacrifices comme des rites visant à
expier les fautes des Vestales coupables d'avoir rompu leur obligation
de chasteté durant ces mêmes années. Un réexamen attentif des textes a
cependant permis de constater d'une part que les dates des sacrifices
humains et des scandales touchant ces prêtresses ne coïncidaient pas
toujours et d'autre part qu'il n'y avait pas de relation directe entre
ces affaires (C. Cichorius, Menschenopfer, p. 7-16, et, plus récemment,
D. Porte, Enterrements, 1984, p. 233-243).

Les modernes fournissent actuellement différents types
de réponses, qui se révèlent complémentaires. D'une part, il peut s'agir
d'un rite d'anéantissement des ennemis. Ceux-ci ont pu être, un jour,
directs, mais aux époques pour lesquelles ces sacrifices sont
documentés, les Grecs et les Gaulois n'ont jamais été en même temps
opposés aux Romains [5]. Les couples de Grecs et de Gaulois ensevelis
vivants peuvent aussi valoir comme symboles des ennemis contre lesquels
il s'agit de protéger Rome, en évitant des désastres futurs ; l'usage de
Grecs et de Gaulois peut être interprété comme une référence aux deux
grands ennemis du passé légendaire ou semi-légendaire de Rome.
L'ensevelissement d'êtres vivants à Rome représente, comme l'a montré A.
Fraschetti à partir de différents exemples, l'expulsion symbolique et
matérielle du monde des vivants ; les personnes ensevelies vivantes sont
livrées au monde des morts et de ses divinités.

D'autre part, et ici le contexte de ces sacrifices est
très clair, il s'agit incontestablement d'un rite visant à expier un
prodige, rite effectué à la suite de la consultation des Livres
sibyllins. Plus subtilement, le contexte de ces rites nous montre de
manière indiscutable qu'il s'agit de détourner un danger extérieur perçu
comme particulièrement menaçant et imminent.

[Retour]


Ensevelissement de vestales fautives

Les vestales, prêtresses chargées de l'entretien du
foyer public, qui n'avaient pas respecté l'obligation de chasteté
inhérente à leur fonction, étaient coupables d'incestus et condamnées à
être ensevelies vives. Cette réalité est bien connue et a fait l'objet
de plusieurs études récentes (voir par ex. A. Fraschetti, 1984 ; Cl.
Lovisi, 1998). Signalons que rares furent les vestales condamnées durant
la République et sous l'Empire.

Les différentes étapes du procès d'une vestale accusée
et les modalités de son ensevelissement ne nous retiendront pas.
Attirons simplement l'attention sur les points suivants.

Les accusations de vestales pour incestus (et les
procès qui s'ensuivent) se déclarent dans des contextes particuliers :
ici aussi A. Fraschetti (1984, p. 101, p. 109-113) évoque des costanti
di emergenza. Sous la République, des prodiges éclatent, qui manifestent
la rupture de la pax deorum, des bonnes relations entre les dieux et la
cité ; après enquête, ceux-ci se révèlent avoir été provoqué par
l'incestus d'une vestale. Une prêtresse coupable d'une telle faute est
impure ; elle a donc contaminé les cérémonies religieuses qu'elle a
accomplies et, ce faisant, provoqué la colère des dieux sur la Ville.
Tant qu'elle n'est pas découverte et châtiée, la colère des dieux frappe
la cité par diverses calamités. Remarquons en outre que les procès de
vestales coupables ou présumées telles ont eu lieu dans des moments
particulièrement significatifs, où Rome était en péril, menacée par des
ennemis extérieurs ou par des troubles internes (A. Fraschetti, 1984, p.
119-120 ; Cl. Lovisi, 1998, p. 703-705, 727-731). À peine la coupable
châtiée cessent les calamités : la pax deorum est restaurée.

La signification de la peine qui frappe les vestales
coupables a également retenu l'attention des savants. Certains ont vu
dans la faute même de la prêtresse un prodige : le châtiment qui s'abat
sur elle constituerait dès lors l'expiation du prodige (G. Wissowa,
Vestalinnenfrevel, 1923-1924, p. 201). Selon A. Fraschetti (1984, p.
121-128), le rite qui préside à l'ensevelissement de la vestale renvoie
grosso modo au contexte du cortège funéraire et du deuil : la vestale
est déjà socialement morte pour la cité. « Par l'ensevelissement, elle
est livrée rituellement au monde des morts et expulsée de la communauté
des vivants qu'elle a contaminée ». Rapprochant le sort réservé aux
vestales des sacrifices humains du Forum Boarium, Cl. Lovisi propose
pour sa part d'interpréter ce châtiment comme un sacrifice humain : «
les vestales composaient une réserve de jeunes filles vouées au
sacrifice pro salute populi Romani en cas de calamité nationale » (Cl.
Lovisi, 1998, p. 729-734, p. 733 pour la citation).

Notons toutefois que malgré la proximité du rite, les
anciens évoquent en des termes fort différents l'ensevelissement des
couples étrangers au Forum Boarium et celui des vestales fautives. D'une
part, ils ne présentent jamais l'ensevelissement d'une vestale vivante
comme un sacrifice : les auteurs parlent simplement d'un ensevelissement
sous terre et évoquent parfois le rituel qui l'accompagne. D'autre part,
ils ne semblent jamais choqués par la peine qui frappe les vestales
coupables et qui peut nous paraître si cruelle. Certains se montrent par
contre heurtés quand la procédure d'enquête n'a pas été respectée - ce
qui est le fait de « mauvais » empereurs. Ainsi, dans le cas de la
grande vestale Cornelia accusée d'incestus vers 90, Pline le Jeune
dénonce la condamnation qui frappe la prêtresse : celle-ci n'était pas
même présente et ne fut pas écoutée lors la réunion du collège
pontifical durant laquelle l'empereur Domitien, grand pontife, la
condamna (Plin. epist. 4, 11, 6-7 ; voir Fr. Van Haeperen, Collège
pontifical, 2002, p. 104-105). La procédure n'a pas été respectée : une
vestale accusée avait normalement le droit de se défendre [6].

[Retour]


Mise à mort rituelle des androgynes

Tite-Live et Obsequens mentionnent à plusieurs reprises
des hermaphrodites dans leurs listes de prodiges, de la fin du 3e
jusqu'au 1er s. av. n.è. (L. Brisson, Sexe incertain, 1997, p. 26-29).
La naissance ou la « découverte » d'enfants hermaphrodites était donc
considérée comme un prodige manifestant la rupture de la pax deorum : il
devait être expié. Voici le récit le plus développé qu'en fait Tite-Live
(27, 37, 5-7), pour l'année 207 av. n.è. :

« Alors que les consciences étaient libérées de leurs
scrupules religieux, elles furent à nouveau troublées par l'annonce qu'à
Frusino était né un enfant aussi grand qu'un enfant de quatre ans :
l'étonnant n'était pas tant sa grande taille que l'incertitude où l'on
était sur son sexe, masculin ou féminin (cela s'était produit aussi à
Sinuessa, deux ans auparavant). Les haruspices qu'on avait fait venir
d'Étrurie dirent qu'il s'agissait là d'un prodige qui souillait et
déshonorait : il fallait bannir l'enfant du territoire romain,
l'éloigner du contact avec la terre et l'immerger en haute mer. On
l'enferma vivant dans un coffre, l'emporta et le jeta à la mer. Les
pontifes décrétèrent de même que trois groupes de neuf jeunes filles
devaient parcourir la ville en chantant un hymne. » (trad. P. Jal, CUF,
1998)

Le traitement à réserver à l'androgyne découvert est
révélé par des haruspices étrusques appelés à Rome. L'enfant doit être
expulsé du territoire romain et arraché de tout contact avec la terre :
il est ainsi enfermé vivant dans un coffre et plongé dans la mer. Ce
traitement, conçu comme une manière d'expier le prodige que représente
l'hermaphrodite, peut être considéré, à nos yeux de modernes, comme une
mise à mort rituelle. Notons cependant que les anciens ne parlent pas de
sacrifice à ce propos : ils évoquent simplement l'immersion de
l'androgyne, tout comme ils parlaient de l'ensevelissement sous terre de
la vestale. Ils ne semblent pas non plus heurtés par cette pratique. À
la différence bien sûr d'Orose (5, 4, 8-11), auteur chrétien, qui
dénoncera cette expiation impie et cruelle comme étant à l'origine d'une
pestilence : la mort d'un homme a provoqué un grand nombre de morts
d'hommes et ne servit à rien.

Pratiquées dans le cadre de la religion publique, les
mises à mort envisagées jusqu'à présent constituent des rites
extraordinaires, répondant à des situations peu fréquentes : danger
ressenti comme particulièrement menaçant, inceste de vestales,
découverte d'hermaphrodites.

Les auteurs chrétiens ont utilisé, nous l'avons
signalé, certains de ces exemples pour dénoncer les rites païens, leur
caractère cruel, les catastrophes qu'ils étaient incapables de
contrecarrer, voire qu'ils provoquaient.

[Retour]


Sacrifice humain à Jupiter Latiaris

Outre ces mises à mort rituelles extraordinaires, peu
fréquentes, les auteurs chrétiens dénoncent également un sacrifice
humain qui aurait été pratiqué chaque année à Rome, dans le cadre d'une
cérémonie publique régulière. Dans un passage consacré aux meurtres
rituels chez les peuples païens, Tertullien (apol. 9, 5) le stigmatise
en ces termes :

« jusque dans cette très religieuse cité des pieux
descendants d'Énée, il y a un certain Jupiter que dans ses jeux on
arrose de sang humain. "C'est le sang d'un bestiaire [= gladiateur]",
direz-vous. Apparemment, c'est là moins que le sang d'un homme !
N'est-il pas encore plus honteux, que ce soit le sang d'un malfaiteur ?
Ce qui est sûr, du moins, c'est qu'il est versé par un homicide. Oh ! le
Jupiter chrétien et fils unique de son père par la cruauté ! » (trad.
J.-P. Waltzing, CUF, 1929)

Ce même rite est également utilisé par d'autres auteurs
chrétiens, dont Minucius Felix (30, 1, 4), dans leur polémique contre
les sacrifices païens : « de nos jours encore Jupiter Latiaris est
honoré, chez les mêmes Romains par un homicide (homicidio colitur), et,
traitement qui sied au fils de Saturne, engraissé du sang d'une canaille
criminelle (noxii hominis sanguine saginatur) ». (trad. J. Beaujeu, CUF,
1974) [7]

Selon les auteurs chrétiens, lors des jeux en l'honneur
de Jupiter Latiaris, qui avaient lieu à l'occasion des Féries latines,
était donc mis à mort un gladiateur ou un condamné à mort, dont le sang
arrosait la divinité.

Si les jeux des Féries Latines, qui avaient lieu
annuellement à Rome, sont attestés ailleurs (voir M. Malavolta, Ludi,
1996, p. 255-273), cette mise à mort rituelle n'est cependant pas
mentionnée par les auteurs latins et grecs antérieurs. S'agirait-il
éventuellement d'une invention de la propagande chrétienne ? C'est
possible ; il faut toutefois signaler à ce propos le témoignage du
néo-platonicien Porphyre (2e moitié du 3e s.), qui combattait aussi la
pratique des sacrifices sanglants : « Mais aujourd'hui encore, qui
ignore que dans la Grande Ville un homme est égorgé lors de la fête de
Zeus Latin » (Porph. abst. 2, 56, 9).

L'évocation du rite sanguinaire en l'honneur de Jupiter
latin n'est donc pas le monopole exclusif de la littérature apologétique
chrétienne. Selon M. Malavolta (1996, p. 268), « il est difficile […] de
penser que Porphyre ait intentionnellement utilisé, en le reprenant aux
auteurs chrétiens (et non donc à une réalité contemporaine bien connue,
comme il l’affirme), un argument polémique qu’il savait inconsistant et
calomnieux ». Serait-il toutefois impossible que Porphyre se soit basé
dans ce cas-ci sur la littérature chrétienne qu’il connaissait puisqu’il
s’employait à la réfuter, sans vérifier la véracité de ces sources ?

Quoi qu'il en soit, il est intéressant de constater,
avec J. Rives, que les auteurs chrétiens emploient ici le topos du
sacrifice humain de la même manière que leurs « collègues » non
chrétiens : celui-ci sert à définir la limite entre deux groupes : il ne
s'agit plus ici des Romains d'une part, des barbares ou des « dévoyés »
et des ennemis de l'État de l'autre mais bien des chrétiens et des
non-chrétiens. Les « civilisés » sont ceux qui se distinguent par le
rejet du sacrifice humain.



[Retour]



Quelques remarques conclusives

Au terme de ce bref parcours, il est possible
d'apporter quelques éléments de réponse à la question posée dans le
paragraphe consacré aux problèmes de définition : à quels propos les
Romains parlent-ils explicitement de sacrifices humains ?

D'une part, l'immolation de victimes humaines apparaît
comme un rite sanglant pratiqué par des « barbares », régulièrement et
légalement. Dans la très grande majorité des cas, les auteurs condamnent
cet usage. Cicéron ne dénonce pas seulement cette pratique mais aussi
ses fondements : c'est une conception erronée des dieux, basée sur la
terreur, qui conduit à de tels actes.

D'autre part, quoiqu'ils dénoncent les sacrifices
humains, les Romains admettent qu'ils se sont livrés à cette pratique,
en différentes circonstances. Évoquons d'abord le cadre légal, de la
religion publique. Leurs ancêtres, estiment-ils, sacrifiaient ainsi
régulièrement aux dieux des victimes humaines, avant que l'un ou l'autre
héros ou personnage considéré comme historique n'abolisse une telle
pratique et ne leur enseigne des rites de substitution. Le rejet du
sacrifice humain représente ainsi, aux yeux des Romains, un des éléments
constitutifs de leur système politico-religieux, dès l'accession à un
certain degré de « civilisation ». Toutefois, à des moments
particulièrement critiques de leur histoire, les Romains ont été
contraints, à trois reprises, de sacrifier des victimes humaines : ce
sont les ensevelissements d'un couple de Gaulois et d'un couple de Grecs
au Forum Boarium. Ces sacrifices ordonnés par les Livres sibyllins ont
été accomplis dans le cadre de la religion publique. Les auteurs les
présentent comme un acte inouï, exceptionnel, contraire aux habitudes
romaines.

D'autres sacrifices humains ont été accomplis par des
Romains, mais cette fois dans des contextes privés. Ceux-ci - peu
importe s'il s'agit de faits réels ou de rumeurs - sont considérés comme
faisant couler le sang. Ces rites relèvent ici non plus de la religion,
mais de la magie ou de la superstition. Ils sont accomplis à de
mauvaises fins par des hommes impies, qu'il s'agisse de dévoyés ou
d'ennemis de l'État et font l'objet d'interdictions et de condamnations.

La thématique du sacrifice humain, que celui-ci soit
pratiqué par des étrangers ou par des ennemis internes, est ainsi
utilisée par les auteurs anciens comme un élément révélateur du degré de
barbarie mais aussi d'une attitude religieuse erronée. Seul les
ensevelissements de couples de Grecs et de Gaulois échappent à ce type
de jugement totalement dépréciatif : accomplis dans le cadre de la «
bonne » religion publique, par des Romains « civilisés », ils n'en
restent pas moins un objet d'étonnement pour les Anciens qui ne manquent
pas de relever leur caractère inouï, exceptionnel.

Notons aussi que les apologistes chrétiens utiliseront
à leur tour la thématique du sacrifice humain pour déprécier les rites
polythéistes des Romains. La ligne de démarcation que la pratique des
mises à mort rituelles permet de tracer ne distingue plus les Romains
des barbares ou des ennemis de l'État mais bien les chrétiens des
non-chrétiens.

Les auteurs anciens n'utilisent par contre pas un
vocabulaire en rapport avec le sacrifice humain, quand ils évoquent
l'ensevelissement de vestales coupables d'incestus ou l'élimination en
mer d'hermaphrodites reconnus comme des prodiges. Ces mises à mort nous
apparaissent pourtant comme rituelles dans la mesure où elles impliquent
des décisions prises par des prêtres et revêtent un caractère
extraordinaire, cérémoniel, qui les distingue des peines de mort
prononcées dans un contexte judiciaire. Il ne semble pas que les anciens
aient porté un jugement négatif sur ces mises à mort, sauf dans les cas
où la procédure n'avait pas été respectée.

Les mises à mort rituelles effectivement accomplies par
les Romains dans le cadre de la religion publique (et que nous avons ici
envisagées) sont extraordinaires : elles ont lieu dans des moments de
crise, manifestés notamment par l'apparition de prodiges, et ont toutes
pour objectif de restaurer la pax deorum. Notons aussi que ces mises à
mort sont accomplies sans effusion de sang : les vestales et les couples
de Grecs et de Gaulois sont ensevelis vivants, livrés au monde des dieux
infernaux ; les enfants androgynes, enfermés dans un coffre, sont jetés
à la mer. Comme le relèvent M. Beard, J. North et S. Price (Religions of
Rome, I, 1998, p. 81), il ne s'agit donc pas de sacrifices au sens
habituel que les Romains donnaient à ce terme : il n'y a pas de
consécration de la victime, pas d'offrande de ses entrailles aux dieux.

Selon les auteurs chrétiens, les Romains auraient
également offert chaque année un sacrifice humain, sanglant, à Jupiter.
Cette question est complexe, nous l'avons vu, et mériterait d'être
approfondie.

Les mises à mort rituelles ici prises en compte ne
constituent qu'un aperçu des cas que nous livre la littérature ancienne.
D'autres exemples auraient pu être cités, tel le sacrifice de trois
cents habitants de Pérouse qu'Auguste aurait offert en 41 av. n.è. sur
l'autel du divin César. D'autres questions mériteraient d'être posées ou
approfondies, relatives notamment aux significations que les Romains
donnaient à ces différents types de mises à mort rituelles. Le sujet des
sacrifices humains à Rome est loin d'être épuisé ; il serait utile d'y
consacrer une vaste synthèse, dépassant les limites d'un simple article.

[Retour]



Notes

[1] F. Schwenn consacra une étude globale aux sacrifices
humains, en Grèce et à Rome (Die Menschenopfer bei den Griechen und
Römern, 1915). Quelques bonnes études ponctuelles ont été récemment
consacrées à l'un ou l'autre aspect de cette thématique (voir
bibliographie et infra). [Retour]

[2] Rappelons que les récits relatifs aux origines de Rome
sont de très loin postérieurs aux faits qu'ils relatent et qu'ils ne
peuvent s'appuyer sur des sources littéraires antérieures à la fin du 3e
s. av. n.è. Ces récits sont avant tout le reflet des représentations que
les anciens avaient développées à propos de leurs origines. Signalons
aussi qu'une bonne partie des rituels présentés par les auteurs comme
des rites remplaçant des sacrifices humains faisaient déjà, dans
l'Antiquité, l'objet d'autres types d'interprétations, dans lesquelles
n'intervenait pas l'explication « remplacement d'une victime humaine par
une autre offrande ». [Retour]

[3] Je me baserai ici sur les articles incontournables de
A. Fraschetti (1981) et de A.M. Eckstein (1982). Menées indépendamment
l'une de l'autre, ces deux études aboutissent souvent à des conclusions
similaires. Je renvoie à ces articles pour l'ensemble des références aux
textes anciens et une discussion approfondie de ceux-ci. Citons aussi
l'étude récente de S. Ndiaye (Minime, 2000, p. 119-128), utile pour sa
bibliographie et pour l'état de la question. [Retour]

[4] Voir par ex. D. Briquel, 1981. Cl. Lovisi (1998, p.
730) a dressé une bibliographie reprenant les différentes hypothèses
relatives à la provenance de ce rite. [Retour]

[5] Selon A. Fraschetti (1981, p. 91-107), Grecs et Gaulois
ont pu être opposés aux Romains dans la première moitié du 4e s. av.
n.è. Les origines du rite de l'ensevelisssement de couples de ces deux
nations remonteraient à cette époque. [Retour]

[6] Voir aussi Dio Cass. 67, 3, 3, à propos de la dureté
d'une enquête relative à des vestales, menée par Domitien. Celles-ci
aussi seront condamnées. [Retour]

[7] Voir aussi par ex. Lact. inst. 1, 21, 3 ; Athan. gent.
25 ; Firm. Mat. err. 26, 2 ; Prud. Symm. 1, 395-399. [Retour]




Bibliographie sélective



M. Beard, J. North, S. Price, Religions of Rome. Volume 1.
A History, Cambridge, 1998.

P. Bonnechère, Le sacrifice humain en Grèce ancienne,
Athènes-Liège, 1994 (Kernos. Suppl. 3).

A. Brelich, Symbol of a Symbol, in Myths and Symbols.
Studies in Honour of Mircea Eliade, éd. J.M. Kitigawa, C.H. Long,
Chicago, 1969, p. 195-207.

D. Briquel, Des propositions nouvelles sur le rituel
d'ensevelissement de Grecs et de Gaulois au Forum Boarium, in REL, 59,
1981, p. 30-37.

L. Brisson, Le sexe incertain. Androgynie et hermaphrodisme
dans l'Antiquité gréco-romaine, Paris, 1997.

G. Capdeville, Substitution de victimes dans le sacrifice
d'animaux à Rome, in MEFRA, 83, 1971, p. 283-323.

C. Cichorius, Staatliche Menschenopfer, in Römische
Studien, 1922, p. 7-16.

A.M. Eckstein, Human Sacrifice and Fear of Military
Disaster in Republican Rome, in AJAH, 7, 1982, p. 69-95.

A. Fraschetti, La sepoltura delle Vestali e la città, in Du
châtiment dans la cité. Supplices corporels et peine de mort dans le
monde antique, Rome, 1984, p. 97-128 (Coll. EFR, 79).

A. Fraschetti, Le sepolture rituali del foro Boario, in Le
délit religieux dans la cité antique, Rome, 1981, p. 51-115 (Coll. EFR, 48).

V. Groh, Sacrifizi umani nell'antica religione romana, in
Athenaeum, 11, 1933, p. 240-249.

Cr. Grottanelli, Ideologie del sacrificio umano : Roma e
Cartagine, in ARG, 1, 1999, p. 41-59.

D.D. Hughes, Human sacrifice in Ancient Greece, Londres,
New York, 1991.

Cl. Lovisi, Vestale, incestus et juridiction pontificale
sous la République romaine, in MEFRA, 110, 1998, p. 699-735.

M. Malavolta, I ludi delle feriae latinae a Roma, in Alba
Longa. Mito, storia, archeologia, éd. A. Pasqualini, Rome, 1996, p. 255-273.

Menschenopfer, in Der Neue Pauly, 7, 1999, col. 1253-1258.

S. Ndiaye, Minime Romano sacro, à propos des sacrifices
humains à Rome à l'époque républicaine, in DHA, 26, 2000, p. 119-128.

D. Porte, Les enterrements expiatoires à Rome, in RPh, 58,
1984, p. 233-243.

J. Rives, Human Sacrifices among Pagans and Christians, in
JRS, 85, 1995, p. 65-85.

J. Scheid, Numa et Jupiter ou les dieux citoyens de Rome,
in Archives des sciences sociales des religions, 59, 1985, p. 41-53.

J. Scheid, La religion des Romains, Paris, 1998.

F. Schwenn, Die Menschenopfer bei den Griechen und Römern,
Giessen, 1915 (RGVV 15, 3).

Fr. Van Haeperen, Le collège pontifical (3ème s. a.C. -
4ème s. p.C.). Contribution à l'étude de la religion publique romaine,
Bruxelles-Rome, 2002 (Institut historique belge de Rome. Études de
philologie, d'archéologie et d'histoire anciennes, 39).

G. Wissowa, Religion und Kultus der Römer, 2e éd., Munich,
1912 (Handbuch der Altertumswissenschaft, V, 4).

G. Wissowa, Vestalinnenfrevel, in ARW, 22, 1923-1924, p.
201-214.
Caligula
2009-03-08 10:24:18 UTC
Permalink
Post by abourick
Les sacrifices humains représentent pour nos esprits
modernes une forme de violence ultime, excessive, extrême. De manière
générale, les Romains condamnaient déjà cette pratique, considérée comme
barbare.
Et voilà. Les Romains considéraient déjà le sacrifice humain comme barbare.

On est loin de ton "Bouc émissaire".
--
Caligula
Pontifex Maximus, Imperator, Pater Patriae.
abourick
2009-03-08 13:02:01 UTC
Permalink
Post by Caligula
Post by abourick
Les sacrifices humains représentent pour nos esprits
modernes une forme de violence ultime, excessive, extrême. De manière
générale, les Romains condamnaient déjà cette pratique, considérée
comme barbare.
Et voilà. Les Romains considéraient déjà le sacrifice humain comme barbare.
On est loin de ton "Bouc émissaire".
Tu n'as pas lu les passages qui justement montrent que les sacrifiés
sont en temps de crises graves des boucs émissaires contre lesquels ont
inventent des accusations délirantes (les relations sexuelles chez les
Vestales dont le texte nous dit qu'elles constituaient un réservoir de
femmes à sacrifier en temps de crise - même pratique en Méso-Amérique
avec les prisonniers de guerre). Les sacrifices extraordinaires (en plus
du sacrifice annuel à Jupiter) ont lieu pendant les crises graves :
externes (guerre) ou internes.

Relis le texte et lis René Girard.
UBUjean-jacques viala
2009-03-08 18:11:08 UTC
Permalink
Post by abourick
Tu n'as pas lu les passages qui justement montrent que les sacrifiés
sont en temps de crises graves des boucs émissaires contre lesquels ont
inventent des accusations délirantes (les relations sexuelles chez les
Vestales dont le texte nous dit qu'elles constituaient un réservoir de
femmes à sacrifier en temps de crise - même pratique en Méso-Amérique
avec les prisonniers de guerre). Les sacrifices extraordinaires (en plus
externes (guerre) ou internes.
nous sommes dans une crise trés grave.

pouvez vous nous suggerer un sacrifice qui soit à la hauteur du
problème?
--
UBU.

Qui pardonne au crime en devient complice.

Voltaire.
abourick
2009-03-09 21:10:44 UTC
Permalink
Post by UBUjean-jacques viala
Post by abourick
Tu n'as pas lu les passages qui justement montrent que les sacrifiés
sont en temps de crises graves des boucs émissaires contre lesquels ont
inventent des accusations délirantes (les relations sexuelles chez les
Vestales dont le texte nous dit qu'elles constituaient un réservoir de
femmes à sacrifier en temps de crise - même pratique en Méso-Amérique
avec les prisonniers de guerre). Les sacrifices extraordinaires (en plus
externes (guerre) ou internes.
nous sommes dans une crise trés grave.
pouvez vous nous suggerer un sacrifice qui soit à la hauteur du
problème?
Lors de la dernière grande crise, celle de 1929 et années suivantes, les
juifs ont servi de boucs émissaires.

Mais à mon avis la crise actuelle c'est de la petite bibine. Dans deux
ans on n'en parle plus.

Continuer la lecture sur narkive:
Loading...